Les questions

Vincent Delahaye, Olivier Cigolotti, Bernard Delcros 13/02/2018

«Questions orales au gouvernement»

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Installation d'officines de pharmacie et seuil minimal de population dans les communes rurales


M. Bernard Delcros . - Le code de la santé publique empêche l'ouverture d'une nouvelle pharmacie dans une commune de moins de 2 500 habitants. Cette règle n'est pas adaptée à la réalité des territoires ruraux, notamment en zone de montagne. Le nombre d'habitant ne peut être le seul critère retenu. Dans ces territoires, des communes parfois de 800 habitants jouent le rôle de bourg-centre et de pôle de services pour tout un bassin de vie. Il faut aussi tenir compte des difficultés de déplacement inhérentes à l'altitude, au relief, à l'enneigement et aux distances à parcourir dans ces territoires vastes mais à faible densité de population.  L'ordonnance du 3 janvier dernier apporte un début de réponse en introduisant de nouvelles dispositions, en permettant notamment de prendre en compte la population des communes contiguës mais à condition que l'une au moins de ces communes compte 2 000 habitants. Or ce seuil ne correspond pas à la réalité du terrain dans les zones rurales. Ainsi, la commune de Vézac, dans le Cantal, compte 1 200 habitants. Pourtant, elle offre divers services dans un bassin de vie de 4 300 habitants répartis sur neuf communes contiguës. Grâce à sa politique de développement, Vézac compte plusieurs commerces, un cabinet médical avec deux médecins, un infirmier, un masseur-kinésithérapeute. Trois candidats se sont fait connaître pour ouvrir une pharmacie, mais l'Agence régionale de santé (ARS) a mis son véto au motif d'un nombre d'habitants insuffisant. Ce n'est pas acceptable, alors que le Gouvernement entend tout faire pour lutter contre les déserts médicaux et maintenir l'offre de soin en milieu rural. Cet exemple illustre parfaitement le fossé qui existe entre la théorie d'une règle et les besoins du terrain. 

Êtes-vous prêt à reconsidérer le cas de la commune de Vézac et à adapter les critères d'ouverture de pharmacies aux réalités du terrain ? 

M. Stéphane Travert, ministre de l'agriculture et de l'alimentation . - Veuillez excuser l'absence de la ministre de la santé.  Le Gouvernement est soucieux de garantir l'égal accès de la population aux médicaments et aux soins sur tout le territoire. L'ordonnance du 3 janvier prévoit des mesures favorables aux territoires ruraux, avec notamment la possibilité de prendre en compte la population des communes contiguës si au moins une des communes atteint 2 000 habitants. Les ARS pourront alors autoriser l'ouverture d'une officine. En outre, les flux de population seront pris en compte, et non la seule population résidente, ce qui permettra à une pharmacie de se rapprocher d'une maison de santé ou d'un centre commercial de proximité pour mieux répondre aux besoins de la population.

De nouveaux leviers sont ainsi mis en place pour soutenir le maillage officinal. La publication des textes d'application de l'ordonnance est prévue à l'été 2018.

M. Bernard Delcros. - Bien sûr, l'ordonnance prévoit des assouplissements, mais ils ne répondent pas aux besoins du terrain. Le seuil à 2 000 habitants ne correspond pas aux problèmes des territoires ruraux, particulièrement en zone de montagne. Il reste un petit pas à franchir pour que l'ordonnance soit en adéquation avec la réalité de la ruralité, surtout en zone de montagne.
  Situation des greffiers des tribunaux de commerce M. Vincent Delahaye . - Il y a deux ans, le président de la République, alors ministre de l'économie, s'intéressait à la réforme des professions réglementées - dont celle de greffier de tribunal de commerce.  Les greffiers sont rémunérés autour de 30 000 euros nets par mois. La profession est endogamique : selon un rapport de l'Inspection générale des finances remis en mars 2013, sept familles détenaient plus de 15 % des offices.  Afin de réduire cette rémunération difficilement justifiable, la loi du 6 août 2015, dite loi Macron, a prévu une baisse de 5 % des tarifs et une gratuité d'accès aux données de la plateforme Infogreffe. Mais le droit de présentation n'a pas été réduit au profit de la libre installation, comme pour les notaires. 

Où en est cette réforme ? Ne faudrait-il pas prévoir une nouvelle baisse des tarifs et accroître la concurrence par la libre installation ?

Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d'État . - La loi du 6 août 2015 a profondément modernisé l'activité des greffiers des tribunaux de commerce. Comme pour les autres professions juridiques, les tarifs sont désormais définis sur la base d'une approche économique. En février 2016, ils ont baissé de 5 %. Ces tarifs doivent être révisés tous les deux ans et feront donc prochainement l'objet d'un nouvel arrêté conjoint des ministres de la justice et de l'économie, sur la base d'une expertise de la DGCCRF. La carte d'installation des greffiers est la résultante de la carte judiciaire. La liberté d'installation n'est donc pas la bonne solution. En revanche, le législateur a souhaité rendre plus méritocratique l'accès à la profession via un concours, solution recommandée par la mission présidée par Richard Ferrand. La titularisation sera conditionnée à la réussite du concours : le premier sera ouvert en 2018.

Dans le cadre du Plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises (Pacte), une simplification est prévue avec notamment la fusion de certains registres, ce qui pose la question de la modernisation de la fonction de teneur de registre...

M. Vincent Delahaye. - Merci pour ces réponses. Le concours est une solution adaptée. Quelles sont les conséquences de la baisse des tarifs sur la rémunération des greffiers ? J'attends de voir les mesures qui seront prises dans le cadre du Pacte. Le sujet intéresse nos concitoyens.
  Démarchage téléphonique


M. Olivier Cigolotti . - Alors que le dispositif Bloctel issu de la loi du 17 mars 2014 relative à la consommation est censé lutter contre le démarchage téléphonique, neuf Français sur dix se disent excédés par son inefficacité.  Il est interdit, sous peine d'amende, de démarcher par téléphone des consommateurs inscrits sur la liste d'opposition au démarchage téléphonique, or les consommateurs reçoivent en moyenne quatre appels téléphoniques de ce type par semaine.  À ma question écrite du 16 février 2017, le Gouvernement avait répondu qu'il fallait laisser au récent dispositif le temps de produire son plein effet avant de revoir, éventuellement, la législation...

Les opérations de contrôle de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) sont manifestement peu efficaces. Le Gouvernement entend-il réviser le dispositif pour limiter le démarchage téléphonique ? Augmenter les amendes ? Intensifier des contrôles ? Ou encore mettre en place un indicatif permettant aux consommateurs de reconnaître ce type de démarchage avant de décrocher ?

Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances . - Plutôt qu'interdire le démarchage téléphonique, le législateur de 2014 a choisi d'instituer une liste d'opposition, à charge pour les entreprises de s'assurer, avant toute prospection, que les numéros ne sont pas inscrits sur cette liste. Ce dispositif a été mis en place en juin 2016, sa gestion confiée à la société Opposetel. Le nombre de consommateurs inscrits atteint 3,5 millions, preuve que Bloctel répond à une attente des Français. En moyenne, chaque numéro de téléphone inscrit sur Bloctel a été retiré plus de six fois par semaine des listes de prospection téléphonique. Ce dispositif a donc évité de nombreux appels, même s'ils restent trop nombreux pour les consommateurs qui ont cru que les appels cesseraient automatiquement. Toutefois, seules 800 entreprises ont adhéré à Bloctel. Des campagnes de mailing sont menées pour les inciter à adhérer, tandis que la DGCCRF diligente des contrôles en lien avec les opérateurs et l'Arcep : 134 entreprises contrevenantes ont ainsi été sanctionnées, jusqu'à 75 000 euros d'amende. 

Enfin, la moitié des appels dénoncés relève de la fraude aux numéros surtaxés, sujet distinct sur lequel la DGCCRF est également fortement mobilisée.

M. Olivier Cigolotti. - Trop peu d'entreprises - 1 % seulement - adhérent à Bloctel. Nos concitoyens s'agacent. Vos services doivent insister sur l'obligation faite aux entreprises de s'inscrire sur Bloctel.