DANS LES MÉDIAS

LA GAZETTE DES COMMUNES : "Elus et professionnels vent debout contre les coupes budgétaires"
Valérie Létard 03/08/2017

Les associations d'élus et de professionnels de la politique de la ville montent au créneau pour fustiger les coupes budgétaires prévues par le décret du 20 juillet dernier. Ils dénoncent un choix "dangereux" et demandent à l'État de tenir ses engagements.. Selon ce texte, paru au creux de l'été, 46,5 millions d'euros du budget accordé à la politique de la ville seraient annulés, soit un gel de 11% des crédits.

Jrobelet La politique de la ville est mise en danger par un choix "gravement préoccupant" et "hasardeux". La sonnette d'alarme est tirée par les maires de l'association "Ville et banlieue" (AMVBF), pour qui l'annulation prévue par le gouvernement de 46,5 millions d'euros en crédits de paiement risque de remettre en cause "l'équilibre social des territoires urbains dégradés et paupérisés, en cours ou en projet de rénovation et redynamisation urbaines".
En ligne de mire : le décret passé inaperçu du 20 juillet dernier paru le 21 au Journal officiel qui détaille les réductions d'enveloppes des différents ministères, dont celles de la politique de la ville. Comme l'évoquait déjà la Gazette la semaine dernière, ce même texte prévoit également de sabrer les crédits de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) et du fonds de soutien à l'investissement local (FSIL).  Dans un communiqué daté du 29 juillet 2017, l'association des maires de banlieues constate que la diminution du budget "politique de la ville" porte avant tout sur "les programmes d'actions portés par des milliers d'associations, pour beaucoup déjà entamés depuis le début de l'exercice 2017 sur la base des engagements pluriannuels contractualisés entre l'État et les collectivités locales". Elle regrette que "tous les crédits non encore engagés" soient ainsi supprimés.  "Risques de rupture des équilibres sociaux"  Alors que le gouvernement s'est d'ores et déjà engagé à respecter la promesse de doubler de 5 à 10 milliards le budget du nouveau programme de renouvellement urbain, l'arbitrage budgétaire du 20 juillet risque de "mettre à mal des actions essentielles d'accès et de médiation vers l'emploi, d'appui aux mobilités, de formation, d'accompagnement à la scolarité, d'offres socio-éducatives, d'éveil à la culture, d'initiation aux sports, d'action solidaire envers les plus pauvres, les jeunes enfants, les seniors, l'égalité hommes-femmes, les personnes porteuses de handicaps, l'accès au logement, à la santé, à la prévention de la délinquance et des radicalisations, d'aide aux victimes, de protection judiciaire, de réinsertion des détenus en fin de peine, d'exercice de la citoyenneté", liste l'AMVBF.  L'association des maires, qui, après avoir été reçue au ministère de la Cohésion des Territoires et à l'Élysée le 18 juillet dernier s'était félicitée de "la volonté manifestée par l'État d'avancer en concertation avec les élus des territoires urbains prioritaires", dénonce aujourd'hui une décision "brutale" et "grave pour les quartiers populaires".  Elle appelle l'État à "simplement tenir ses engagements, pour prévenir les risques de rupture grave des équilibres sociaux dans les territoires urbains où vivent près de 5 millions d'habitants de la France républicaine".  La politique de la ville "en danger"  Déjà échaudé par l'absence de ministère dédié dans le gouvernement, l'Inter-réseaux des professionnels du développement social urbain, qui réunit plusieurs centaines de chefs de projet et de chargés de mission, estime pour sa part que "la politique de la ville, qui a disparu des radars nationaux, est en danger". L'IRDSU affirme que l'annulation de plus de 46 millions d'euros de crédits sur le programme "politique de la ville" en 2017 va "à l'encontre des besoins et menace dès cette année des actions menées en faveur des quartiers prioritaires et de leurs habitants".  L'association regrette que la mobilisation des politiques de droit commun en faveur des "quartiers sortants de la géographie prioritaire, dits 'de veille active'" se traduisent peu dans les faits. "A défaut d'évaluation de la trajectoire de ces quartiers certains risquent d'être réintégrés dans la géographie prioritaire en 2020", craint-elle.  L'IRDSU constate en outre que le décret du 20 juillet annule également 40 millions d'euros de crédits de paiement "sur le programme 104 dédié aux politiques d'intégration et au financement des formations linguistiques pour les primo-arrivants".  Le tour de vis budgétaire épargnera-t-il la politique de la ville ?  Vers des "quartiers de relégation"  "L'annonce du gel de 11% des crédits alloués à la politique de la ville, conjugué à une baisse imposée des dépenses des collectivités de 13 milliards d'euros est inquiétante", indique quant à elle la sénatrice ValérieLétard (Nord, Union Centriste) dans une interview accordée au Courrier des maires.  L'auteure, avec Annie Guillemot (Rhône, PS), d'un rapport d'évaluation sur la loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine, dite "loi Lamy" de 2014, estime que "ce sont des économies qui n'en sont pas". "Si on laisse échouer une politique aussi importante que celle-ci, le risque est bien de se retrouver dans 5 ans avec de véritables quartiers de relégation et devoir tout reprendre à la case départ", redoute la sénatrice du Nord.  Des "dépenses urgentes" de 3 milliards d'euros  Le Décret du 20 juillet 2017 portant ouverture et annulation de crédits à titre d'avance prévoit l'annulation de 46,5 millions d'euros en crédits de paiement sur le programme 147 "Politique de la ville" de la mission "Politique des territoires". Ces crédits "porteront pour partie sur la réserve de précaution (18 millions d'euros en crédits de paiement) et sont permis par les marges de manoeuvres offertes par certains dispositifs discrétionnaires", souligne le gouvernement dans le Rapport relatif à ce décret.  Si les explications ne sont pas très détaillées, l'objectif du gouvernement est clair : "financer plusieurs dépenses urgentes" à hauteur de 3 milliards d'euros en annulant des budgets pourtant inscrits en loi de finances.  Les crédits transférés de la mission "politique des territoires", d'un montant total de 84,5 millions d'euros, doivent notamment permettre "l'ouverture des places d'hébergement d'urgence supplémentaires nécessaires à la mise à l'abri des migrants en transit sur le territoire parisien" et la pérennisation des 5 000 places hivernales décidée en mars 2017 afin d'augmenter les capacités du parc d'hébergement.